Les huiles essentielles sont elles antivirales ? Part V

Notre réflexion de départ

Notre saga touche à sa conclusion. Nous avons passé en revue une grande partie de la littérature scientifique disponible sur les propriétés antivirales des huiles essentielles. Part I; Part II; Part III; Part IV. Au départ notre interrogation était simple. Dans le contexte actuel marqué par une pandémie virale que nul n’avait prévu, les conseils d’utilisation d’huiles essentielles dont les propriétés anti-infectieuses sont bien connues paraissaient être logiques. Mais anti-infectieux est un terme bien large et nous avions affaire à un virus bien particulier ! Il était important d’y voir plus clair et de proposer une approche logique qui puisse aider chacun dans ses efforts pour contrecarrer cette épidémie.

Comme toujours des voix multiples d' »experts » mettaient en garde, dans les médias, contre l’inefficacité et le manque de preuve des approches naturelles et de même de multiples articles, sites et « thérapeutes » diffusaient des recettes et compositions « antivirales » ou de « protection par les huiles essentielles ». L’ensemble de ces réactions nous paraissaient exagéré par apport au corpus de connaissances disponibles et relever plus de positions doctrinales.

La formation médicale -surtout- et pharmaceutique -légèrement moins- méconnaissent totalement les produits naturels. Tout juste y apprend t’on l’origine naturelle de certains grands médicaments (notamment antibiotiques) mais l’utilisation de produits issus de la plante n’est plus, ni connue, ni étudiée, et considérée systématiquement comme désuète, dépourvue d’efficacité et surtout « sans résultats cliniques démontrés ». Nous reviendrons sur ce dernier point qui est probablement le nœud de crispation, de défiance et d’incompréhension. La réaction négative sur les approches naturelles, du corps médical hospitalier, très présente dans les instances de santé, de conseils et de régulation n’est donc pas surprenante. Souvent, de bonne foi, par méconnaissance de la littérature existante – peu médiatisée et répondant souvent faiblement à leur critères de jugement – , des avis négatifs ont été rendus.

Pour les tenants des approches naturelles, l’intérêt antiviral des huiles essentielles ne fait pas débat. Mais leurs arguments sont souvent faiblement scientifiquement étayés. Les références citées étant régulièrement des livres ou des sites internet, qui se copient les uns les autres, sans que les données originales soient consultées. De bonne foi, des affirmations sont posées sans forcément en avoir les arguments. Par contre, l’usage traditionnel, parfois séculaire (voir millénaire !!), et la grande expérience personnelle de certains, constituent des « études cliniques dans un monde réel » souvent sur de larges populations qui mériteraient d’être considérées mais échappent aux critères réglementaires actuels.

Sans doute est-il présomptueux de vouloir réconcilier ces mondes qui peuvent paraître antagonistes ! Pourtant si on y regarde de près la piste des huiles essentielles comme antiviraux naturels mérite que l’on s’y penche sérieusement.

  • Le potentiel anti-infectieux des huiles essentielles repose sur un rationnel scientifique fort pour les bactéries et les champignons microscopiques; des données existent aussi pour certains virus
  • Une utilisation chez l’homme est courante dans des pathologies infectieuses depuis plusieurs millénaires
  • Leur utilisation, si les règles de sécurité sont appliquées ne pose pas de problème majeur
  • Ces produits sont peu onéreux et peuvent constituer une solution abordable pour des populations pour lesquelles les médicaments seront économiquement hors de portée

Ce que nous avons appris

Il y a peu de littérature sur les effets antiviraux des huiles essentielles. Ils sont, clairement , moins bien explorés que les effets antibactériens. La difficulté méthodologique des essais sur les virus est sans doute la principale raison de ce manque de données.
Part I; Part II

Néanmoins, plusieurs études tant in vitro sur culture cellulaires que in vivo chez l’animal ont montré des potentialités antivirales pour certaines huiles essentielles. Quelques virus (notamment les virus de l’herpes et les virus grippaux) ont été étudiés ainsi que quelques huiles essentielles, de nature variée. Les conclusions de ces études sont très délicates à tirer sauf peut- être pour les virus de l’herpes type 1 et 2 pour lesquels le faisceau d’arguments est solide au regard de certaines huiles essentielles. Pour les autres pathologies virales, les données disponibles sont trop parcellaires pour pouvoir affirmer un intérêt scientifiquement validé ; pour le SRAS-CoV1, une seule publication très incomplète, et aucune pour le moment sur le SRAS-CoV2.
Part III; Part IV

Sur les huiles essentielles qui sont le plus testées positivement sur des souches virales, sont retrouvées ; les cannelles ou leur composant principal le cinnamaldéhyde; le thym, la sarriette et l’origan à thymol/carvacrol. Ceci n’est pas surprenant car ce sont les huiles qui ont un caractère anti-infectieux fort, principalement en altérant les membranes bactériennes. Un effet analogue est souvent revendiqué sur l’enveloppe ou la capside de certains virus.
Nous avons été surpris de ne pas voir dans la littérature l’huile essentielle de ravintsara Cinnamomum camphora à 1,8-cinéole pourtant très largement citée dans les ouvrages d’aromathérapie comme antivirale. Parmi les huiles aux composants moins habituels nous avons noté notamment le manuka et la mélisse.

Nos souhaits pour l’avenir

Compte tenu des informations disponibles dans la littérature qui, bien qu’encore insuffisantes, sont porteuses d’espoir,

Compte tenu de l’expérience très étendue d’usage dans des diverses pathologies virales, notamment respiratoires avec des retours positifs et des effets nocifs essentiellement dus à de mauvaises pratiques d’utilisation, de dosages et de non respect des contres-indications,

Compte tenu du faible prix de ces solutions, de leur disponibilité notamment dans des pays à faible revenu,

Il nous semble important que des études in vitro plus approfondies soient menées sur différents virus et démarrées urgemment sur le SARS-CoV2. Il n’est ni justifié ni bénéfique de rester dans un tel niveau d’inconnu et de pré-supposé.

Des études cliniques sont indispensables, elles doivent être pensées de façon raisonnable sans vouloir absolument calquer les standards d’études du médicament, peu adaptés aux produits naturels, mais en gardant une rigueur scientifique et statistique indispensable. Nous voulons croire que cela est possible et sommes disponibles pour participer à établir les critères de telles études.

De telles études pourraient être financées sur fonds public via des appels d’offres ciblés, les sommes nécessaires sont minimes en regard des efforts consacrés à des approches par des médicaments allopathiques.

Manuka – Leptospermum scoparium